De nombreux dépanneurs ont vendu à perte le mois dernier, ignorant que le lait avait augmenté

Alain B. (nom fictif) exploite un dépanneur 7 Jours en région depuis de nombreuses années.

Quand nous lui avons appris, la semaine dernière, que le prix du lait avait fortement augmenté depuis le 1er septembre dernier, il n’était pas de bonne humeur.

“Quoi? Ça fait un mois que je paie le lait plus cher sans le savoir et que je le vends à perte en n’ayant pas ajusté le prix? Comment ça se fait qu’on ne m’a pas mis au courant?”

Vérification faite, son livreur de lait a négligé de l’informer. Quant à sa bannière, ce n’est pas dans ses habitudes de transmettre de pareilles nouvelles.

Robert L. (nom fictif) possède pour sa part un dépanneur indépendant dans les Hautes Laurentides. Lui aussi tombait des nues.

“Je l’ai su de mon laitier local, mais je pensais que ça ne s’appliquait qu’à ses produits! Eh ben, merci de l’information!”, de lancer ce dernier.

Enfin, Weng Chong (nom fictif aussi), propriétaire à Montréal, s’en est aperçu par lui-même, mais deux semaines plus tard.

“C’est ma femme qui a réalisé que le prix avait augmenté en examinant les factures, mais autrement, je continuerais à le vendre aux prix d’avant. Le laitier ne nous a tout simplement pas avisé”, de lancer ce dernier.

Sur une dizaine de propriétaires contactés la semaine dernière, tous les indépendants, sans exception, se sont fait prendre par surprise par la récente hausse du prix du lait.

Or, non seulement ont-ils vendu à perte dans certains cas, mais en plus, ils ont violé la loi sans le savoir en offrant du lait, dans certains cas, à prix inférieur au prix minimum!

Une hausse exceptionnelle en plein été

Qu’est-il donc arrivé pour que le gouvernement se décide à hausser le prix du lait en plein été, sachant qu’en temps normal, c’est au mois de février que ça se passe et que l’industrie a généralement deux mois pour s’ajuster?

En août dernier, la Régie des Marchés agricoles et alimentaires du Québec (RMAAQ) a été saisie du fait que la Commission canadienne du lait a décrété une hausse du prix de soutien du beurre aux producteurs laitiers.

Ce dernier est passé de 8$ à 8,39$ par kilogramme à partir du 1er septembre, ce qui équivaut à une augmentation du prix du lait de 0,026$ le litre.

Avant de voir cette hausse se répercuter aux détaillants et venir écraser leurs faibles marges, l’Association des détaillants en alimentation (ADA) a plaidé et obtenu pour l’imposition d’une hausse similaire sur le prix de détail (voir décision de la Régie ici).

Et quelle hausse! D’un coup de baguette magique, les prix minimum et maximum du 2L de 2% ont augmenté de 9 sous.

Depuis le mois de février 2016, la fourchette des prix minimum et maximum du lait réglementé était restée inchangée (ici, le prix du populaire 2L de 2%). Cette année, deux hausses subséquentes sont venues augmenter le prix de 4% environ. La plus récente, celle du mois de septembre, a été de loin la plus importante avec une hausse de 9 sous pour le 2%.

Cette hausse du prix n’a toutefois pas été accompagnée par une hausse correspondante de la fourchette entre prix minimum et maximum, comme le demande l’ADA pour chaque nouvelle augmentation. C’est seulement à cette condition que les détaillants peuvent espérer voir leurs marges indexées aux coûts de l’inflation.

Les indépendants désavantagés?

Cette situation met en lumière la vulnérabilité des propriétaires indépendants lorsqu’il s’agit de rester informés des hausses de prix réglementés au sein de l’industrie.

En effet, tous les propriétaires membres de grandes bannières nous ont dit avoir appris les changements de prix de leur franchiseur et aucun, parmi ceux à qui nous avons parlé, n’avait négligé de hausser les prix du lait dès le 1er septembre.

Les seuls pris par surprise sont les indépendants: à moins que leur laitier les avise, ils ne peuvent compter que sur leur vigilance pour rester au fait des changements de prix.

Ces derniers, par ailleurs, doivent se rappeler qu’il est interdit à leur fournisseur de lait de vendre du lait réglementé plus cher que le prix minimum édicté par la Régie.

Car comme l’a bien souligné l’un d’entre eux :

“Déjà qu’on fait pas une cenne avec ce produit là, il faudrait toujours bien pas qu’on commence à en perdre!”

En effet, voilà bel et bien un problème dont ils peuvent parfaitement se passer!

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