VAPOTAGE: Le CCID presse Québec de maintenir les saveurs dans les dépanneurs
Selon diverses sources provenant de l’industrie, Québec serait sur le point d’interdire la vente des saveurs de vapotage partout sur le territoire. Le Conseil des ministres du gouvernement Legault aurait notamment endossé un projet de réglementation en ce sens et ce dernier serait sur le point d’entrer en vigueur. Ce ne serait plus en fait qu’une question de semaines.
Cette nouvelle tuile, si elle s’avère, forcerait ainsi les 8000 dépanneurs, épiceries, tabagies et vapoteries du Québec à cesser toute vente de liquides avec saveur exception faite de l’arôme de tabac et possiblement, de menthol.
En réponse à cette menace, le principal représentant de l’industrie des dépanneurs au Québec, Michel Gadbois, a pris la plume aujourd’hui afin de presser les élus à poursuivre la vente de saveurs dans les dépanneurs en faisant valoir, entre autres, la conformité exemplaire et solidement établie de l’industrie à prévenir la vente aux mineurs.
Dans une lettre ouverte dont DepQuébec a obtenu copie (voir ici), le vice-président du Conseil canadien de l’industrie des dépanneurs (CCID) interpelle François Legault et Christian Dubé en leur indiquant qu’ils « se trompent de cible » s’ils entendent prohiber la vente chez les dépanneurs pour protéger les jeunes.
Mauvaise cible
Les arguments ne manquent pas, en effet, pour justifier le maintien de la vente de saveurs dans les dépanneurs selon le CCID, à commencer par la question des jeunes.
« Nous savons que nous sommes les détaillants les plus responsables (…) de produits soumis à une limite d’âge. Les propres données du Québec montrent un taux de conformité de 91%. L’idée qu’on peut nous faire confiance pour vendre du tabac, de la loterie et de l’alcool de manière responsable, mais pas pour vendre des produits de vapotage est absurde. » — Lettre ouverte du CCID
En entrevue avec DepQuébec, le signataire a estimé qu’il importe d’indiquer au gouvernement qu’il fait fausse route et de lui rappeler à quel point les détaillants agissent de manière responsable pour éviter que de tels produits se retrouvent dans les mains de mineurs.
« Bien que le vapotage chez les jeunes est préoccupant, la quasi-totalité de ceux qui vapotent, soit plus de 90%, s’approvisionnent ailleurs que chez nous », de souligner M. Gadbois.
Les faits semblent bien lui donner raison puisque sur le site même de l’INSPQ (qui est le principal organe de recherche en santé publique), on y indique que selon deux études, très peu d’élèves (soit environ 3%) parmi ceux qui vapotent rapportent se procurer leurs produits dans un dépanneur (source: ici).
Manne pour le marché noir
L’autre aspect est bien entendu pragmatique. Si la vente légale est interdite et que la demande demeure ce qu’elle est, les ventes proviendront désormais soit du marché noir ou soit du commerce en ligne. Autrement dit, deux scénarios face auxquels les gouvernements sont totalement impuissants.
« En excluant les dépanneurs du marché, le gouvernement ne fait que transférer les ventes à tout le réseau parallèle de ventes illégales. Les interdictions de toutes sortes ne fonctionnent jamais, elles alimentent simplement le marché illégal. » — Lettre ouverte du CCID
Le fait de remettre ces produits dans les mains du marché noir représente certes une forme d’absurdité difficile à comprendre. Car d’une part, une vague de produits non contrôlés vont venir menacer directement la santé des jeunes et d’autre part, Ottawa et bientôt Québec, qui s’apprête aussi à taxer le vapotage, ne percevront plus aucune redevance.
Pire, les deux palliers de gouvernement se coupent ainsi complètement du marché et n’auront plus rien ni personne à inspecter pour faire appliquer la loi.
Occasion ratée de santé publique
L’autre cruelle ironie est bien entendu le fait de retirer un produit qui joue un rôle extrêmement utile pour aider et encourager les fumeurs à écraser.
« Si les gouvernements veulent vraiment aider les fumeurs adultes à arrêter de fumer, les dépanneurs sont en première ligne. Les fumeurs sont déjà habitués à acheter leurs cigarettes légales dans les dépanneurs. Il s’ensuit que, pour encourager davantage de fumeurs adultes à essayer le vapotage, une petite sélection d’arômes appropriés et approuvés par le gouvernement fédéral devraient être disponibles aux mêmes endroits où les cigarettes sont vendues. » — Lettre ouverte du CCID
Fait cocasse, le gouvernement britannique vient justement d’annoncer un programme visant à distribuer plus d’un million de vapoteuses gratuites aux fumeurs pour les aider à écraser (source: ici). Or, pendant ce temps, Québec fait la sourde oreille et s’arrange même pour rendre ces produits utiles et précieux encore moins accessibles aux fumeurs.
Homme de toutes les batailles, Michel Gadbois a vu beaucoup d’eau couler sous les ponts, lui qui a su convaincre les gouvernements fédéral et provinciaux de baisser les taxes sur le tabac en 1994 pour éliminer la contrebvande de même que de hausser la répression et les pénalités au Québec en 2009.
Fort de son expérience, il demeure optimiste pour la suite des choses : « Les dépanneurs ont toujours été là pour servir la communauté et continueront de le faire. Il faut espérer que les gouvernements comprennent leur utilité, apprécient leur contribution et surtout, cessent de leur mettre des bâtons dans les roues. »
Il faut bien l’espérer, en effet!