Sur 10 ans, on voit bien que le permis d’alcool a été augmenté et non pas « indexé »

Chaque année, comme on sait, les droits et tarifs des différents permis du gouvernement sont « indexés », c’est-à-dire qu’ils subissent une augmentation systématique minime pour soi-disant refléter la hausse de l’inflation. On est alors tous sous l’impression que le coût réel des tarifs demeure le même et que les hausses annuelles visent simplement à refléter l’inflation.

Mais est-ce vraiment le cas?

L’ajustement annuel de la tarification des droits et permis du gouvernement provincial est-elle vraiment « une indexation » ou plutôt, « une augmentation » déguisée?

Si on prend un cas isolé, le permis d’alcool, on voit clairement que tel qu’on peut l’anticiper pour tout ce qui s’appelle chose gouvernementale, il s’agit bien bien d’une augmentation et non d’une indexation.

En effet, une compilation effectuée par DepQuébec à partir de données fournies par l’Association québécoise des dépanneurs en alimentation (AQDA) indique que pour le seul droit annuel du permis d’alcool pour épicerie émis par la Régie des alcools, courses et jeux (RACJ), le coût a augmenté de 30 % plus vite que l’inflation depuis 10 ans, soit de fait une augmentation réelle déguisée du coût du permis… que rien ne justifie!

Évolution du coût du permis d’alcool pour épicerie

Année
Coût du permis d'alcool
Hausse %
Inflation %
Diff. vs inflation
2006
136 $
2,26 %
1,70 %
33 %
2007
139 $
2,21 %
1,60 %
38 %
2008
142 $
2,16 %
2,10 %
2,8 %
2009
145 $
2,11 %
0,60 %
251 %
2010
148 $
2,07 %
1,20 %
73 %
2011
151 $
2,03 %
3,00 %
-32 %
2012
155 $
2,65 %
2,10 %
26 %
2013
157 $
1,29 %
0,70 %
84 %
2014
158 $
0,64 %
1,39 %
-54 %
2015
160 $
1,26 %
1,05 %
20 %
2016
163 $
1,87 %
0,72 %
160 %
2017
165 $
1,27 %
Diff. 2006-2016
27 $
19,85 %
15,40 %
28,9 %

Ce qui étonne dans cette compilation est le fait que certaines années, les hausses de la Régie sont nettement plus élevées que l’inflation (ex : 2009, 2010 et 2016) et que malgré tout, celle-ci ne vient jamais, ou très rarement, compenser les hausses abusives du passé par des diminutions ultérieures.

De sorte que si le coût du permis avait suivi l’inflation, il aurait été de 157 $ en 2016 au lieu de 163 $, une différence significative de 4 %, qui représente la hausse réelle imposée au permis sur une période de 10 ans. Appliquée à tous les tarifs et permis du gouvernement, une telle pratique finit par coûter très cher!

Pourtant, selon le dernier rapport annuel de la RACJ, celle-ci laisse clairement entendre dans un jargon typiquement bureaucratique que l’imposition des tarifs repose essentiellement sur une indexation par rapport à l’inflation.

Tous les produits et les services de la Régie sont tarifés selon une méthode de fixation des tarifs associée à des valeurs historiques inscrites dans les lois et les règlements. En 2015-2016, la Régie a réalisé deux exercices d’ajustement tarifaire (1er janvier et 1er avril) où des calculs d’indexation basés sur l’indice des prix à la consommation (IPC) ont été effectués  afin de répondre aux exigences réglementaires associées aux différents secteurs d’activité. – Rapport annuel de la RACJ, page 52

Ce plus, ce même rapport annuel révèle que les revenus générés par la tarification du permis d’alcool aux épiciers est largement supérieurs aux coûts engendrés par l’émission et la gestion de ces permis :

  • Revenus générés en 2015-2016 : 19,15 M $
  • Coûts de gestion : 6,1 M $
  • Profit pour la RACJ : 13,05 M $ (soit 213 %)

La RACJ elle-même convient du fait qu’elle est sur-financée puisqu’elle admet, dans le même souffle :

Globalement, la rentabilité de la Régie s’est améliorée alors qu’un niveau de financement de 250 % a été atteint comparativement à 227 % au cours du dernier exercice financier. – Rapport annuel de la RACJ, page 52

Les questions qui se posent sont les suivantes  :

  • Est-ce que la Régie et le gouvernement en général se servent de l’indexation comme prétexte pour y camoufler des hausses déguisées?
  • Est-ce que la Régie ne devrait pas revoir à la baisse le coût du permis pour s’ajuster au coût réel de son émission et de sa gestion?
  • En quoi un sur-financement de 213 % pour les permis d’alcool et de 250 % dans l’ensemble est-il justifié et à quoi sert cet argent pris sur le dos des entreprises et particuliers?

Alors que le gouvernement s’apprête à revoir de fond en comble le fonctionnement de la Régie, ces questions doivent être soulevées.

Il y a un principe fondamental de transparence qui est violé ici car si les détaillants doivent subir des hausses, qu’on le dise et qu’on explique pourquoi!

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