Deux des trois grandes chaînes annoncent simultanément d’importantes mises à pied

Ce n’est sans doute pas un hasard si, trois mois avant la hausse spectaculaire du salaire minimum en Ontario qui passera de 11,60 $ à 14 $ (une hausse de 21 %), deux des trois grands de l’alimentation au Canada ont annoncé des plans majeurs de restructuration de leurs opérations, d’investissements en productivité et de réduction de personnel et ce, presqu’en même temps. Quant au troisième joueur, ce type d’annonce a déjà été fait bien plus tôt dans l’année.

Tout a commencé avec Sobey’s, sans doute le plus mal en point des trois.

En effet, le prix de l’action de Empire Company, sa compagnie mère, est resté le même depuis cinq ans. Selon le Globe & Mail, “en se fondant sur sa marge de profit net de 0,67 %, Empire Company est moins efficiente que les autres compagnies de son industrie à transformer ses revenus en bénéfices.”  Plusieurs analystes montrent du doigt l’acquisition de Safeway en 2013 comme étant la cause principale de leurs soucis financiers (voire l’article suivant: How Sobeys screwed up Safeway in a messy takeover that left empty shelves, massive losses, and drove customers away).

Le 4 mai 2017, on apprenait qu’une restructuration majeure est en cours chez l’épicier IGA-Sobeys et que le Québec ne serait pas épargné (source : TVA). Le nouveau président et chef de la direction annonçait un plan étalé sur trois ans pour réduire les coûts de gestion de 500 millions $, sans qu’on sache vraiment encore quels postes seront abolis et ce, d’ici la fin de l’année. Michael Medline a déclaré que le “Projet Sunrise” allait simplifier la gestion de l’entreprise et générer des économies de 500 million $ par année d’ici 2020, lui permettant ainsi de réinvestir pour améliorer les ventes et les bénéfices (source: Globe & Mail).

«Nous sommes déterminés à aller de l’avant avec une rapidité sans précédent pour prendre des décisions difficiles et effectuer des changements sans compromettre le service à nos clients», a indiqué M. Medline.

Cet ancien dirigeant de Canadian Tire a commencé chez Sobeys en janvier seulement. Il a indiqué que l’épicier allait agir pour restructurer l’organisation en éliminant “les duplications régionales encombrantes et la complexité dans le processus décisionnel ainsi que les opérations.”

Puis, le 11 octobre dernier, Metro annonçait vouloir éliminer 280 emplois à compter de 2021 dans le cadre d’un programme d’investissement de 400 million $ visant à rehausser la productivité de ses centres de distribution en Ontario (source: Huffington Post).

La modernisation et l’automatisation de son réseau devrait aider à éliminer 180 emplois à temps plein et 100 emplois à temps partiel. Cette annonce faisait suite à des commentaires par l’entreprise indiquant que l’entreprise envisagerait une automatisation accrue de ses opérations afin de compenser la hausse du salaire minimum à 15 $ en Ontario qui sera effective à compter du 1er janvier 2019.

“Cet investissement va permettre à Metro de poursuivre sa croissance et son expansion dans le marché de l’Ontario,” a indiqué le président de chef de la direction, Éric La Flèche. “Fort d’une chaîne d’approvisionnement renouvelée et modernisée, nous serons encore mieux à même de répondre aux besoins de nos clients.”

Puis, cinq jours plus tard, soit le 16 octobre 2017, ce fut au tour des Compagnies Loblaw d’annoncer la mise à pied de 500 employés de bureau, tout en précisant qu’elles s’attendaient toujours à créer plus d’emplois, cette année, qu’elles n’en éliminent (source : La Presse).

Certains des employés touchés ont été informés presqu’en même temps que le public et plusieurs des postes touchés ont été éliminés immédiatement. Les 500 emplois éliminés se trouvent à tous les niveaux du soutien aux magasins et comprennent divers postes de direction.

« Notre entreprise se trouve à un point d’inflexion, avec des pressions croissantes – de la part de nouveaux coûts et de nouveaux concurrents – et plusieurs occasions de croissance et d’évolution », a affirmé Mme Davis, ajoutant que Loblaw était toujours engagée à réduire ses coûts et à être exploitée de façon efficace.

À les entendre, ça n’a jamais été mieux et aussi prometteur que depuis qu’ils coupent des emplois. C’est à se demander pourquoi ils ont engagé du personnel pour commencer!

Blague à part, la synchronicité des ces annonces, surtout les deux dernières, en moins d’une semaine, est saisissante. Cela envoie certainement un message très fort au gouvernement de l’Ontario qui a toujours rejeté les critiques selon lesquelles sa décision d’augmenter le salaire minimum si rapidement allait détruire des emplois.

Tandis que Sobey’s se donne des plans ambitieux de réduction de personnel mais à plus long terme et semble vouloir en mener large en même temps, Metro s’en tient pour le moment à une plus grande automation. Quant à Loblaws, son annonce de coupure est certainement la plus agressive et celle qui dénote le plus grand sentiment d’urgence. Est-ce que ça va si mal que ça?

Car avec ou sans hausse de salaire minimum, on sait déjà bien entendu que le modèle d’affaire traditionnel de supermarché est sous pression et que face à une demande stagnante, voire légèrement fléchissante, et face surtout à une concurrence accrue (Costco, Walmart mais aussi partout où on vend désormais du prêt-à-manger comme les dépanneurs par exemple), les chaînes n’ont d’autre choix que de chercher la croissance à l’interne, en fournissant les mêmes produits et services à la clientèle mais à moindre coût.

Toutes ces annonces se font en outre alors que l’économie va relativement bien… on ose imaginer ce que serait la réalité dans le contexte d’une récession économique!

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