Bye Bye Four Loko : à son tour, Ottawa serre la vis aux boissons sucrées alcoolisées
L’onde de choc suivant le décès accidentel de la jeune Athéna Gervais se poursuivra dans les prochaines semaines avec une nouvelle vague de restrictions réglementaires à déferler sur la vente de boissons sucrées alcoolisées.
En effet, c’est au tour d’Ottawa de mettre en place, à la grandeur du pays, de nouvelles normes règlementaires plus strictes interdisant, dans les faits, la vente de Four Loko et ce, même à la SAQ (qui de toute façon n’en vendait pas).
De plus, de nombreux produits similaires mais affichant un taux d’alcool réduit de 6,9%, ne pourront plus être offerts en dépanneur comme c’est le cas actuellement car ils dépassent de peu les nouvelles normes du fédéral!
C’est donc toute une catégorie de produits qui, promise à un brillant avenir, se voit ainsi couper les ailes par les circonstances accablantes des récents événements.
Et ce n’est pas fini puisqu’une troisième vague attend encore l’industrie l’année prochaine.
Un maximum d’alcool par contenant
La façon avec laquelle Ottawa intervient est habile.
Le gouvernement s’apprête ainsi à fixer un maximum absolu d’alcool — soit 25,6 ml — par contenant vendu de cette catégorie de produits, peu importe le volume et ce, jusqu’à concurrence d’un litre.
Cette dose d’alcool correspond à un verre et demi, soit une consommation raisonnable.
Or donc, tous les fabricants ne pourront dépasser cette dose dans leur produit, ce qui revient en somme aux résultats suivants :
- 7,5 % alc./vol. si elle est vendue dans un contenant de 341 mL;
- 7,2 % alc./vol. si elle est vendue dans un contenant de 355 mL;
- 5,4 % alc./vol. si elle est vendue dans un contenant de 473 mL;
- 4,5 % alc./vol. si elle est vendue dans un contenant de 568 mL;
- 3,6 % alc./vol. si elle est vendue dans un contenant de 710 mL;
- 3,5 % alc./vol. si elle est vendue dans un contenant de 740 mL;
- 2,6 % alc./vol. si elle est vendue dans un contenant de 1 000 mL autre qu’un contenant en verre.
De fait, Four Loko pourrait toujours techniquement continuer de vendre son produit au Canada, mais dans un contenant ridiculement petit de 213 ml! Cela irait tellement à l’encontre du concept de cette boisson qu’une telle éventualité n’arrivera bien sûr jamais.
Curieusement, Ottawa a choisi d’exempter les boissons offertes dans des bouteilles en verre. Le projet de règlement explique le raisonnement ainsi.
« En raison de leur longue histoire d’utilisation, les consommateurs sont susceptibles d’identifier ces formats (en verre) comme renfermant plusieurs portions d’alcool. L’intention de la politique n’est pas de viser les contenants à plusieurs portions. Bien qu’on puisse abuser de ces contenants, le consommateur prendrait une décision éclairée de consommer plus d’alcool et serait plus conscient des conséquences. Les bouteilles de verre de 750 mL et plus seraient donc exemptées du projet de règlement. » – Santé Canada
Une réglementation unique par sa sévérité
Le Canada deviendra ainsi le premier pays, sauf erreur, à limiter par voie réglementaire le taux d’alcool pour ce type de boissons.
Ailleurs dans le monde, on est intervenu davantage pour retirer les ingrédients de type « boissons énergisantes » comme la taurine et la caféine, ou encore, hausser les taxes.
En Nouvelle-Zélande, une loi proposait à l’origine de limiter les boissons prêtes à boire à 5 % alc./vol. et de les limiter aux contenants ne renfermant pas plus de 1,5 verre standard. Mais à la suite de consultations auprès de l’industrie, le gouvernement a accepté d’autoriser cette dernière à prendre des mesures volontaires pour limiter les risques liés à ces boissons, et de n’adopter des réglementations que si ces mesures volontaires s’avéraient inefficaces.
Pas de chance que ça arrive ici, bien entendu!
Une gifle bien méritée
À l’époque, elles formaient une nouvelle catégorie de boissons alcoolisées dynamiques et attirantes.
Tout leur souriait: Four Loko et ses consoeurs auraient pu connaître un brillant avenir au pays.
Mais ici, au Québec et au Canada, il faut désormais oublier ça.
L’accident ayant causé la vie à la jeune Athéna Gervais a tout changé et l’onde de choc de cette catastrophe continue de se faire sentir à travers le pays.
Des leçons à tirer
Il faut bien le dire, on peut difficilement blâmer les politiciens de vouloir éviter un autre drame comme celui d’Athéna Gervais.
Il y a certes eu de la malchance, mais aussi quand même, un manque de retenue dans les pratiques de l’industrie, toutes tendances confondues.
Au Québec, de nombreux clignotants jaunes se sont allumés et même, à plusieurs occasions, certains détaillants indépendants ont même refusé d’en vendre.
Si quelqu’un, quelque part, avait lancé l’initiative d’instaurer des pratiques volontaires plus responsables et prudentes avant qu’un drame se produise, les produits seraient probablement encore sur les tablettes.
C’est dommage car des milliers de consommateurs les appréciaient et la vaste majorité en consommaient de manière responsable.
Aux États-Unis, ils continuent à être disponibles et les gens sont libres d’en acheter ou non.
Il y a certes des leçons à tirer de ce désastre mais malheureusement, il est trop tard pour revenir en arrière.
Reste plus qu’une troisième vague à subir : les restrictions prochaines sur les messages et promotions dans les médias sociaux (voir article ici).
Attachez votre tuque.