“Il n’y a aucune preuve crédible que l’emballage neutre va hausser la contrebande” – Santé Canada

Cannabis, vapotage et tabac: trois catégories de produits, trois nouvelles législations et trois dossiers majeurs pour les dépanneurs qui ont tous pour dénominateur commun le rôle central joué par Santé Canada, le puissant ministère fédéral de la Santé dont la juridiction jouxte, dédouble et voire même souvent empiète celle des provinces qui ont aussi chacune leur propre ministère de la Santé.

Or, contrairement au Ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) du Québec dont les 60 inspecteurs sillonnent la Belle Province de haut en bas, les fonctionnaires de Santé Canada sont très peu en contact avec les dépanneurs.

Pourtant, la plupart des changements réglementaires récents proviennent du gouvernement fédéral et/ou de Santé Canada en particulier (légalisation du cannabis, légalisation de la vente de nicotine pour vapotage, emballage neutre).

Pour faire le point sur ces enjeux, nous avons donc contacté directement Santé Canada au cours des dernières semaines pour obtenir des réponses aux questions clés que se posent les dépanneurs.

Entre autres, nous avons voulu savoir :

  • qui détermine ultimement si un objet est un accessoire de cannabis ou non;
  • que pense Santé Canada du fait que certaines provinces sont plus permissives que d’autres pour ce qui est du vapotage;
  • et quel est l’impact appréhendé de l’emballage neutre sur la contrebande de tabac.

Voici les réponses obtenues… parfois abrégées, mais toujours sans filtre!


Partie 1: Cannabis | Il revient en pratique au Québec de définir ce que sont les accessoires

DepQuébec: Le fédéral définit les accessoires de cannabis de manière assez large et Québec s’appuie sur cette définition dans sa loi. Est-ce que le fédéral entend publier une liste de ce qu’elle considère comme étant des accessoires de cannabis ou entend-elle laisser aux provinces le soin de les définir?

Santé Canada:  La Loi sur le cannabis renferme plusieurs dispositions concernant les accessoires liés au cannabis, qui sont définis comme suit :

  • toute chose présentée comme pouvant servir à la consommation de cannabis, notamment les papiers à rouler ou les feuilles d’enveloppe, les porte-cigarettes, les pipes, les pipes à eau, les bongs ou les vaporisateurs;
  • toute chose qui est généralement utilisée pour la consommation de cannabis et qui est vendue au même point de vente que le cannabis, et ce, peu importe comment elle est présentée comme pouvant servir à la consommation de cannabis.

Par ailleurs, la Loi comporte plusieurs interdictions en matière de promotion qui s’appliquent aux accessoires de cannabis. Une fiche d’information a également été mise en ligne (cliquer ICI).

NDLR: Mis à part les accessoires clairement définis dans la loi fédérale (bongs, vaporisateurs, etc.), les autres doivent être vendus « au même point de vente que le cannabis ». Or, au Québec, seule la SQDC a le droit de vendre du cannabis. Cela donne donc carte blanche au MSSS de déterminer ce qui est ou non un accessoire pour tout ce qui est vendu à l’extérieur du réseau de la SQDC (exemple : égraineuses).


Partie 2: Vapotage | Contrairement au Québec, Santé Canada convient que c’est une alternative moins nocive que le tabac

DepQuébec: En Ontario, les dépanneurs ont le droit de promouvoir cette catégorie de produit à leur clientèle en magasin tandis qu’au Québec, il est interdit d’en montrer, comme le tabac. Est-ce que le fédéral est satisfait des dispositions divergentes des provinces?

Santé Canada:  Le gouvernement du Canada admet que les provinces et les territoires peuvent choisir de prendre des mesures supplémentaires en ce qui concerne la réglementation des produits de vapotage sur leur territoire, et que ces mesures peuvent varier d’une région à l’autre du pays.

Pour ce qui est du fédéral, les produits de vapotage sont traités de façon distincte des produits du tabac en vertu de la Loi sur le tabac et les produits de vapotage (LTPV) car il y a suffisamment de preuves pour conclure que le vapotage est une source de nicotine moins nocive que le tabagisme.

Voici les principaux objectifs du gouvernement du Canada en matière de réglementation des produits de vapotage :

  • empêcher les jeunes et les non-fumeurs de vapoter et de développer une dépendance à la nicotine;
  • amener les fumeurs adultes à cesser de fumer ou à passer complètement à une source de nicotine moins nocive.

La LTPV établit un certain nombre de restrictions, notamment l’interdiction de la vente des produits de vapotage aux jeunes et l’interdiction de divers types de publicité des produits de vapotage.

Elle permet certaines publicités préférentielles et informatives relativement aux produits de vapotage, tandis que ce n’est pas le cas pour les produits du tabac.

Il y a suffisamment de preuves pour conclure que le vapotage est une source de nicotine moins nocive que le tabagisme. — Santé Canada

DepQuébec: Quel type de publicité préférentielle permettez-vous?

Santé Canada: Les publicités préférentielles et informatives relatives aux produits de vapotage sont permises, mais sont assujetties aux restrictions énumérées dans la LTPV. Le contenu des promotions permises doit être conforme à la loi.

Il n’y a pas de restriction sur le placement des promotions permises dans la loi, mais il existe un pouvoir réglementaire de restreindre davantage le contenu et le placement des publicités permises.

En Ontario, les dépanneurs ont le droit de distribuer de la documentation sur les produits de vapotage, de poser des affiches en magasin et même de présenter des vidéos en boucle.

Les publicités ne doivent pas enfreindre les autres restrictions liées à la promotion, telles que la publicité attrayante pour les jeunes, la publicité de style de vie, les témoignages et la promotion d’arômes qui sont particulièrement attrayants pour les jeunes, comme les arômes de confiserie et de dessert.

NDLR: En interdisant tout affichage, promotion ou autre du vapotage dans les dépanneurs, le Québec empêche les dépanneurs québécois de tirer profit des dispositions fédérales qui permettent, jusqu’à un certain point, de promouvoir le vapotage comme une alternative moins nocive au tabac. Québec agit de fait comme si vapoter est aussi dangereux que fumer. Cela va à l’encontre de l’approche de Santé Canada — ainsi que de la littérature scientifique — qui considère le vapotage comme une opportunité de santé publique auprès des fumeurs.


Partie 3 : Emballage Neutre | Santé Canada rejette les craintes qu’il puisse encourager la contrebande

DepQuébec: L’emballage neutre vient dans les faits apposer les normes de l’industrie de la contrebande à l’industrie légale. Qu’est-ce que Santé Canada pourrait dire pour rassurer les dépanneurs?

Santé Canada:  Le gouvernement du Canada reconnaît que les cigarettes illégales moins chères minent les efforts déployés pour réduire le tabagisme. Il continue de surveiller et d’évaluer les activités de contrebande de tabac. Plusieurs mécanismes sont déjà en place pour régler le problème du tabac illicite. Les paquets de cigarettes vendus au Canada continueront d’être tenus d’afficher un timbre fiscal comportant des caractéristiques de sécurité évidentes et cachées.

Des allégations selon lesquelles des règlements supplémentaires entraîneraient une augmentation de la contrebande ont été formulées en 2009, lorsque le Canada a présenté ses premières mesures visant à restreindre les arômes dans les cigarettes et les petits cigares. Ces allégations ont été faites de nouveau en 2011, lorsque le Canada a augmenté la taille des mises en garde sur les paquets de cigarettes et de petits cigares afin qu’ils couvrent 75 % du paquet.

Dans ces deux cas, des recherches universitaires indépendantes montrent que le marché du tabac de contrebande n’a pas augmenté, et il n’y a aucune preuve crédible qui indique qu’il augmentera maintenant.

Le gouvernement du Canada s’est engagé à adopter des exigences relatives à un emballage neutre, comparables à celles qui existent actuellement en Australie et au Royaume-Uni. Ces exigences visent à protéger la santé des Canadiens et à protéger les jeunes contre les incitations à consommer des produits du tabac et la dépendance qui en découle.

Le règlement proposé comprend des dispositions visant à restreindre les éléments distinctifs sur les emballages de tabac tels que les couleurs de la marque, les logos et les graphiques. Le gouvernement a mené de vastes consultations sur le projet de règlement, a tenu compte de nombreuses considérations et va de l’avant avec un échéancier de mise en œuvre qui maximisera les avantages pour la santé publique tout en réduisant au minimum les conséquences imprévues.

Il n’y a aucune preuve crédible qui indique que le marché du tabac de contrebande augmentera maintenant. — Santé Canada

NDLR: Des propos rassurants certes, mais rappelons qu’il n’y avait pas de preuve non plus que la hausse des taxes sur le tabac, au début des années 2000, allait considérablement augmenter la contrebande et c’est pourtant bel et bien ce qui s’est produit.

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