Voulant contrer DepQuébec, la RACJ s’emmêle les pinceaux et affiche des prix minimums erronés

Elle est bien bonne celle-là.

Mardi dernier, avant même que la Régie des alcools, courses et jeux (RACJ) ne le fasse, DepQuébec annonçait à ses lecteurs en exclusivité que la prochaine hausse de prix minimum sur la bière sera de 2,3%.

Le portail y allait même d’une prédiction fine des nouveaux prix, comme ceci :

  • de 2,9777 $ à 3,0462 $ le litre pour les bières de moins de 4,1 % d’alcool par volume;
  • de 3,1452 $ à 3,2175 $ le litre pour les bières d’au moins 4,1 % et au plus 4,9 %;
  • de 3,2626 $ à 3,3376 $ le litre pour les bières de plus de 4,9 % et au plus 6,2 %;
  • de 3,3720 $ à 3,4496 $ le litre pour les bières de plus de 6,2 % d’alcool par volume.

Visiblement irritée d’avoir été ainsi prise de court — surtout après que le quotidien Le Soleil se soit mis de la partie (voir article ici) — la Régie a voulu donner une gifle au portail en dévoilant, en fin de journée mardi, des ajustements qui contredisent les chiffres de DepQuébec.

Tel qu’affichés depuis mardi soir sur l’onglet “Nouvelles” du site internet de la Régie (voir ici), les “vrais” prix minimums 2019 de la bière seront sensiblement différents, selon la RACJ, de ceux annoncés par DepQuébec, le tout reflétant une hausse de 2% plutôt que de 2,3%. Vraiment?

Ainsi, plutôt que d’attribuer une hausse de 2,3%, la Régie hausse les prix minimum de 1,99%… une méchante différence de 0,3%!

Et comme pour ajouter l’insulte à l’injure, la Régie ajoute ceci :

“Nous vous rappelons qu’il est de la responsabilité de la Régie de déterminer les prix minimums de la bière vendue par un titulaire de permis d’épicerie. La présente liste prévaut sur toute autre information qui pourrait être véhiculée.” – Nouvelles — site internet de la RACJ

C’est bien juste si on ne l’entend pas chantonner “nananana-na”!

Mais n’allez surtout pas vous fier à ces chiffres.

La Régie de la gaffe

Car malheureusement pour la Régie, dans sa précipitation et son aveuglement à vouloir remettre à sa place le portail web numéro un des dépanneurs, elle s’est royalement fourvoyée dans ses calculs.

Voici comment.

Tel que le spécifie son propre réglement, la hausse du prix minimum de la bière se calcule de manière très précise en fonction d’indicateurs connus.

“Ces prix minimums sont ajustés au 1er avril de chaque année selon l’évolution de l’indice des prix à la consommation pour le Canada couvrant la période du 1er janvier au 31 décembre de l’année précédente, tel qu’établi par Statistique Canada.” — Règlement 18 de la Loi sur les permis d’alcool

Ainsi, voyez comment cette règle a été rigoureusement appliquée depuis 10 ans, et comment elle devrait donc logiquement s’appliquer cette année :

À chaque année depuis 2008, la hausse des prix minimum de la bière a correspondu à l’IPC canadien de l’année précédente, arrondi à une décimale près, de sorte qu’en suivant le même modèle, il a été facile pour DepQuébec de prédire avec précision ce que serait la prochaine hausse.

En effet, selon trois sources officielles absolument sûres dont Statistique Canada qui est la source de référence citée dans le règlement (ici, ici et ici), l’IPC canadien moyen en 2018 a été 2,3% et non pas 2%.

Ces mêmes sources confirment également l’IPC des années précédentes et sur lesquelles s’est appuyée la RACJ pour calculer ses hausses, soit 1,6% en 2017, 1,4% en 2016, 1,1% en 2015, etc.

Donc, impossible qu’il y ait erreur ici. C’en est gênant.

La Régie n’a fourni aucune explication quant à l’origine de ce mystérieux 2%. L’erreur a sans doute été de prendre le mauvais taux d’IPC, soit non pas l’IPC moyen 2018 qui va du 1er janvier au 31 décembre 2018 et qui est de 2,27%, mais celui de décembre 2017 à décembre 2018 qui est de 1,99%.

Et ce petit 0,3% de différence, rappelons-le, n’est pas rien: il pourrait même représenter des millions de dollars de revenus en plus pour l’industrie et les détaillants.

Alors si vous nous demandez comment il se fait que DepQuébec connait mieux la réglementation d’alcool que l’organisme chargé de l’appliquer, nous n’avons aucune réponse à cette question.

Chose certaine, et malgré ses prétentions, ne vous fiez pas aux chiffres de la Régie: fiez-vous davantage à ceux de DepQuébec.

Une source résolument plus fiable d’information, comme le démontre le présent exemple.

Un commentaire sur "Voulant contrer DepQuébec, la RACJ s’emmêle les pinceaux et affiche des prix minimums erronés"

  • 14 mars 2019 à 09:21
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    Vive DepQuébec notre chien de garde !

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