EXCLUSIF: Le MSSS considère désormais tout accessoire de cannabis comme étant du tabac
Égraineuses, nettoyants à bong, balances, plateaux à rouler, pochettes et même briquets et cendriers appréciés des amateurs de cannabis… le MSSS ne veut plus les voir étalés ni vendus aux mineurs, point à la ligne!
En effet, DepQuébec a appris en exclusivité qu’une nouvelle politique administrative sur les accessoires de cannabis vient d’entrer en vigueur, début novembre. Fini l’ouverture et la tolérance envers les accessoires de cannabis secondaires: désormais, ils sont tous considérés comme du tabac et doivent se soumettre aux mêmes contraintes réglementaires sous peine de lourdes amendes.
En se reposant sur plusieurs considérations légales détaillées plus bas, cette politique oblige désormais les propriétaires de dépanneurs, tabagies et boutiques spécialisées de cesser immédiatement d’étaler à la vue tout accessoire présenté ou réputé favoriser ou accompagner la consommation de cannabis.
Les détaillants peuvent certes continuer de vendre de tels accessoires mais en les cachant à la vue et en ne les exhibant que sur demande de la clientèle: interdit de les montrer, de les publiciser ou encore de les annoncer sur les réseaux sociaux. La vérification d’âge est en outre obligatoire, la vente en ligne interdite tout comme la vente lors d’une transaction inférieure à 10$, taxes incluses.
Et si des articles comme les égraineuses et les nettoyants à bong sont clairement identifiés en tant qu’accessoire de cannabis, d’autres produits comme les balances, les briquets ou les cendriers peuvent ou non faire partie de cette catégorie en fonction du contexte.
Ainsi, il appartiendra désormais aux inspecteurs du MSSS de démêler dans chaque cas précis si tel ou tel article est un accessoire de cannabis ou non selon divers critères subjectifs comme le lieu de la vente, la réputation du produit ou encore, sa perception auprès des consommateurs.
Et parce qu’ils s’exposent à des amendes salées pour avoir simplement étalé à la vue un article jugé comme accessoire de cannabis, les détaillants devront rester à l’affût et faire preuve de grande prudence. Un joli casse-tête en perspective!
Une longue liste d’accesssoires maintenant réglementés comme du tabac
La nouvelle politique d’application de la loi édictée par le MSSS ne fait pas l’objet d’un document public qu’on peut consulter mais n’en demeure pas moins officielle: elle a été confirmée par écrit et en détail à DepQuébec.
Elle a pour effet de placer sous l’égide de la réglementaion du tabac une longue liste d’accessoires de cannabis qui, auparavant, en étaient exemptés et pouvaient être vendus librement.
Avant la légalisation en 2018, en effet, presque tous les accessoires du cannabis étaient en vente libre mais depuis, seuls les articles suivants étaient considérés comme du tabac:
- Les papiers à rouler, filtres et embouts
- Les feuilles d’enveloppe
- Les porte-cigarettes
- Les pipes et leurs composantes (ex: grilles)
- Les pipes à eau
- Les bongs
- Les vaporisateurs.
- Tous les accessoires, pièces et articles liés au vapotage sans exception
En plus d’être spécifiquement mentionnés dans la loi pour la plupart, ces accessoires peuvent tous être portés à la bouche, d’où une certaine cohérence entre ceux qui étaient du tabac et ceux qui n’en étaient pas.
On excluait ainsi d’emblée des accessoires secondaires comme les égraineuses, les balances et les torches au butane qui ne se portent pas à la bouche et peuvent aussi servir à d’autres choses que de consommer du cannabis.
Fini les exceptions
La nouvelle politique du MSSS vient donc colmater tous les trous et mettre fin aux exceptions qu’on tolérait avant. On élargit ainsi la notion d’accessoire à tout ce qui sert à la consommation de près ou de loin, comme l’illustre la liste suivante:
- Les broyeurs (grinders)
- Les produits de nettoyage pour les pipes
- Les pochettes pour mettre du cannabis ou des joints
- Les extracteurs de concentré
- Les filtres de ces extracteurs
- Les filtres de pipes
- Les balances
Cette liste officielle ci-haut nous a été transmise par le MSSS. Le ministère précise toutefois que celle-ci n’est pas exhaustive mais découle essentiellement de la nouvelle interprétation en vigueur.
On peut dès lors la compléter sans risque d’erreur avec d’autres accessoires du même type dont l’utilité est axée sur la consommation de cannabis:
- Les égraineuses sous forme de carte
- Les briquets spécialisés pour le cannabis (torche au butane ou encore briquets de marque “Clipper”)
- Les plateaux pour rouler des joints
- Les contenants à cocotte de marijuana
- Les rouleuses à joints ou outils pour aider à rouler
- Les petites pinces pour tenir des joints sans se brûler les doigts
- Les filtres portables pour réduire l’odeur de cannabis
- Les gadgets aidant à conserver l’humidité du cannabis
Aussi, plus on s’éloigne des accessoires typiques de cannabis, plus on entre dans des zones grises comme les briquets, allumettes et cendriers. Eux aussi peuvent être considérés comme des accessoires au cannabis, tout dépendant d’une foule de facteurs très subjectifs selon le contexte de chaque magasin et chaque produit.
Des zones grises à gérer
Avant de statuer sur les briquets et cendriers, il importe de comprendre les causes de ce changement d’interprétation par le MSSS.
Ainsi, bien que les lois et réglements n’aient pas changé d’un iota depuis la semaine dernière, c’est la manière de les appliquer qui a évolué comme l’explique la porte-parole du MSSS.
“Comme pour toute nouvelle loi, l’interprétation est appelée à évoluer. La connaissance des produits existants, les faits rapportés par les inspecteurs à la suite des inspections ainsi que les discussions avec la Direction de la légalisation du cannabis et Santé Canada nous ont amenés à faire évoluer notre position, entre autres dans un objectif d’arrimage avec les instances fédérales.” — Marie-Claude Lacasse, porte-parole du MSSS dans un courriel à DepQuébec
Autrefois sous l’égide d’une seule loi, la réglementation des produits et accessoires reliés au tabac s’est considérablement complexifiée ces dernières années avec l’ajout presque simultané du vapotage et du cannabis.
On se rappellera en effet que la loi québécoise sur le tabac a été révisée en 2015 pour notamment inclure la réglementation sur le vapotage qui est désormais considéré, au Québec, comme du tabac à part entière.
Puis, dans la foulée de la légalisation du cannabis par le gouvernement Trudeau en 2018, Québec a adopté une nouvelle loi encadrant le cannabis qui, pour l’essentiel, reprend de grands pans de la loi sur le tabac hormis la création de la SQDC.
Ainsi, tout ce qui concerne la vente, l’étalage et l’affichage des affiches qui concernent la vente aux mineurs et la mise en garde du ministre se retrouve dans dispositions de la Loi concernant la lutte contre le tabagisme, soit aux articles 13 à 20.7 inclusivement. Il est donc interdit de vendre des accessoires de cannabis à des mineurs et de les étaler dans un point de vente. Mais qu’est-ce qu’un accessoire?
C’est là où le MSSS a “évolué” si on veut, en tenant compte du fait que la loi québécoise encadrant le cannabis prévoit à l’article 2 que les accessoires de cannabis ont le même sens que dans la Loi fédérale, qui en fait une définition très large.
La loi fédérale prend le dessus
La Loi fédérale sur le cannabis définit les accessoires comme suit : “toute chose qui est généralement utilisée pour la consommation de cannabis et réputée être présentée comme pouvant servir à la consommation de cannabis lorsqu’elle est vendue au même point de vente que le cannabis“.
Pour résumer, tout objet présenté comme pouvant servir à la consommation de cannabis est un accessoire de cannabis. Il en est de même de toute chose généralement utilisée pour la consommation de cannabis qui est vendu dans un point de vente de cannabis.
“La Loi fédérale crée donc une présomption à l’effet que tout objet servant généralement à la consommation de cannabis vendu dans un point de vente de cannabis est un accessoire de cannabis.” — Marie-Claude Lacasse, MSSS
Autrement dit, un briquet, un cendrier ou des allumettes, selon cette définition, pourrait être considéré comme un accessoire de cannabis s’il est vendu dans un contexte qui valorise leur utilisation pour consommer du cannabis.
Impacts pour les détaillants
Le marché des accessoires de cannabis a pris beaucoup d’ampleur dans la foulée de la légalisation, une opportunité dont les dépanneurs pouvaient tirer profit jusqu’à maintenant.
Les tabagies, détaillants de tabac et boutiques spécialisées ont vu leurs ventes d’accessoires augmenter et certaines chaînes spécialisées comme Prohibition ont connu une forte croissance en misant sur ce segment et en ouvrant même des succursales à proximité des magasins de la SQDC, un peu comme les pharmacies font à proximité des cliniques médicales.
La panoplie d’accessoires offertes par la SQDC est très limitée et comme la loi permet la vente d’accessoires dans le privé, c’est un marché intéressant.
Les impacts seront donc ressentis par tous :
- Plus aucune visibilité de produits auprès des clients, qui seront avisés de l’offre par une simple affiche “Articles pour fumeurs” posée à l’extérieur et/ou à l’intérieur;
- Cartage de tous les produits vendus;
- Vente de moins de 10$ interdites pour ces produits;
- Interdiction de vente en ligne;
- Risque accru d’amendes suite à des inspections mystère du MSSS par des mineurs qui peuvent demander d’acheter de tels produits.
Par ailleurs, le MSSS nous confirme au moins une bonne nouvelle, soit que les accessoires cachés à la vue peuvent à tout le moins revêtir une feuille de cannabis sur le produit.
“En vertu des articles 47 et 50 de la Loi encadrant le cannabis, il est permis de vendre un accessoire de cannabis sur lequel figure un nom, un logo, un signe distinctif, un dessin, une image ou un slogan qui est associé directement au cannabis, à une marque de cannabis, à la SQDC ou à un producteur de cannabis. Ainsi, un accessoire de cannabis peut arborer la feuille de cannabis.” — Marie-Claude Lacasse, porte-parole du MSSS
Mais encore une fois, pour ce genre de réglementation, les détaillants qui ont pignon sur rue se voient désavantagés par rapport aux commerces en ligne comme Amazon et autres qui continuent d’écouler leurs produits sans aucune restriction légale, avec rabais de volume, promotion et visibilité et ce, sans aucune vérification d’âge (voir article ici).
Cette injustice devient de plus en plus intenable et il faudra bien, tôt ou tard, que le MSSS y remédie car ça n’a vraiment, mais vraiment plus aucun sens!
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Robert
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