EXCLUSIF : Le flou légal depuis 15 ans a favorisé l’éclosion de 1000 “vape-shops” au pays

Tandis qu’on anticipe cette année l’adoption de la loi S-5 qui viendra mettre de l’ordre, pour la première fois, dans le marché du vapotage ainsi que légaliser la vente de nicotine à vapoter, une récente étude de la firme européenne ECigIntelligence, dont DepQuébec a obtenu copie, vient montrer à quel point le flou légal entourant ce produit au Canada depuis 15 ans a profité aux “vape-shops” qui sont désormais pas moins de 1000 au pays et dont le succès repose principalement sur la commercialisation discrète, mais sans gêne, des fluides avec nicotine, ce qui est techniquement illégal mais ce que recherchent principalement la vaste majorité des amateurs de vapotage.

En effet, selon les données de la firme de recherche européenne, le marché canadien aurait généré l’an dernier, en 2017, un volume annuel de ventes de l’ordre de 160 M$ dominées en grande partie par les boutiques spécialisées.

Selon ECigIntelligence, les trois quarts des ventes effectuées proviennent de détaillants ayant pignon sur rue, mais la vaste majorité de ceux-ci sont des “vape-shops” et non des dépanneurs. Les vape-shops offrent pour la plupart des fluides avec nicotine — ce qui est défendu sans permis — tandis que les dépanneurs traditionnels — et en particulier ceux qui font partie de grandes chaînes — s’abstiennent de telles ventes en raison de leur statut légal incertain.

Comme a pu le constater DepQuébec en effectuant quelques appels, la vaste majorité des boutiques de vapotage offrent en magasin des fluides avec nicotine, ce qui est en théorie interdit puisqu’aucun manufacturier n’a reçu, à date, de permis en ce sens. Or, la demande pour ce produit est alimentée en grande majorité par des consommateurs recherchant une alternative au tabac et se tournant donc vers les fluides de nicotine à prime abord. De fait, il est bien connu que les adeptes du vapotage qui ne recherchent que la saveur sans aucune drogue — qu’il s’agisse de nicotine, THC ou autre — sont une minorité d’utilisateurs.

Cette boutique de la chaîne Vape Dépot à Varennes n’annonce pas ouvertement la vente de fluides avec nicotine mais en offre pourtant amplement. Elle se présente aussi comme “L’alternative #1 au tabac” ce qui vient le suggérer indirectement. Ce message commercial faisant une association entre vapotage et tabac pourrait devenir interdit avec l’adoption de la loi S-5 ou encore, soumis à l’approbation des autorités règlementaires de Santé Canada.
Québec vient assurer la pérennité des vape-shops avec sa loi 44

Au Québec, le marché du vapotage y est le plus actif toutes proportions gardées : avec 240 000 utilisateurs estimés, soit un peu moins du quart environ du nombre de fumeurs, le marché génère 40 millions $ de ventes selon ECigIntelligence, la vaste majorité, soit 80%, étant des ventes générées en magasin et non en ligne.

De plus, les boutiques spécialisées y occupent une part plus grande du marché : on en compterait 350 au Québec qui s’accaparent 70% du marché contre seulement 10% pour les détaillants traditionnels. La majorité des utilisateurs québécois, comme le reste du Canada d’ailleurs, penchent pour des systèmes de vapotage ouverts, dans lequel il faut soit-même remplacer les liquides et non simplement des cartouches.

Depuis l’adoption en 2015 du projet de loi 44 sur le contrôle du tabagisme, les boutiques spécialisées doivent se soumettre à une série de règlements : s’enregistrer, interdire l’accès des mineurs dans leur boutique, ne pas fournir d’échantillons gratuits, ne pas tester les produits à l’intérieur du magasin et autres. Cela étant dit, la loi vient renforcer leur statut légal et aussi, leur octroyer l’avantage concurrentiel d’être les seuls à pouvoir montrer les produits et accessoires en magasin tandis que les dépanneurs, parce qu’ils permettent l’accès en magasin de mineurs, n’ont plus ce droit depuis 2015 et doivent cacher les produits et accessoires comme c’est le cas pour les produits du tabac.

Selon ECigIntelligence, les boutiques de vapotage sont de plus organisées en chaînes : près du quart des 1000 boutiques recensées appartiendraient ainsi à des chaînes dont les grands noms sont Ez VapeLa Vape Shop et  Vape Dépot, ces deux dernières étant basées au Québec. Les ventes de produits de vapotage en ligne sont interdites au Québec mais cela n’empêche pas ces dernières d’y occuper 20% du marché, contribuant là encore à la confusion légale entourant la mise en marché du produit.

En Ontario, la province voisine comprendrait 300 000 utilisateurs et 400 boutiques spécialisées, soit davantage que le Québec mais moins en terme de proportion, compte tenu de sa population plus élevée.

Toutefois, depuis l’adoption du projet de loi 44 au Québec, l’Ontario a suivi peu après avec l’adoption du Smoke-Free Ontario Act qui vient encadrer plus sévèrement la commercialisation de ces produits, en établissant notamment l’âge légal à 19 ans.

La répartition des vape-shops au Canada, selon ECigIntelligence, vient démontrer la prépondérance des marchés québécois et ontarien et aussi le développement accéléré du réseau de vape-shops québécois (cliquez sur la carte pour agrandir).

 

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