Depuis 10 ans, 1$ de taxe tabac au Québec rapporte 31% de plus en revenus qu’en Ontario
Il n’y a pas que la péréquation qui profite aux finances du Québec: son habileté fiscale y est aussi pour quelque chose.
Ainsi, cela fait longtemps qu’on y affiche les taxes les plus basses au pays pour ce qui est du tabac, une politique qui enrage les groupes de santé.
Or, selon l’analyse présentée ici, cette retenue à vouloir hausser les taxes du tabac trop haut et trop vite serait au contraire pleinement salutaire et justifiée.
En gardant les taxes à un niveau relativement bas, Québec a nettement supplanté l’Ontario en matière d’efficacité fiscale, c’est-à-dire par sa capacité à générer davantage de revenus de taxes par fumeur.
Et ce n’est pas rien car on parle ici de centaines de millions de dollars additionnels en revenus de taxes par année!
De la grosse argent comme on dit, dans les coffres d’un État qui en a grandement besoin.
Un calcul fascinant
Pour se faire une opinion de la stratégie fiscale du Québec, c’est une bonne idée de la comparer à l’Ontario.
Les deux provinces ont sensiblement le même environnement de marché, la même exposition à la contrebande (le Québec étant sans doute pire) avec une économie plus vibrante (en Ontario) que celle du Québec (quoique plus diversifiée).
Toutefois, lorsqu’on parle d’efficacité fiscale, les statistiques de vente ne sont d’aucune utilité car ils ne reflètent que les ventes légales. Or, on sait très bien qu’une partie du marché va à la contrebande, d’où le phénomène d’évasion fiscale et son corrollaire, l’efficacité fiscale qui est le sujet de cet article.
Donc pour y voir clair, il faut se concentrer sur les fumeurs, voir combien il y a en, combien ils paient en taxes et ainsi, jeter un éclairage sur la performance des deux États voisins à générer des revenus d’impôts dans ce marché.
Un ajustement est toutefois nécessaire car il appert, selon les statistiques, que les fumeurs québécois consomment beaucoup plus de tabac par jour que leurs confrères ontariens.
Pour comparer des pommes avec des pommes, on se doit donc d’ajuster le nombre de fumeurs au Québec pour refléter cette réalité car si on laissait la situation telle qu’elle, l’efficacité fiscale par fumeur pourrait s’expliquer simplement parce que ces derniers fument plus!
Ayant réglé la question du nombre de fumeurs, nous pouvons nous tourner vers celle des revenus de taxes.
Pour estimer l’efficacité fiscale des deux provinces, nous commencerons par diviser les recettes annuelles de chaque État par leur nombre de fumeurs (un nombre ajusté pour ce qui est du Québec).
En effet, l’Ontario taxe davantage les fumeurs que le Québec, ce qui va nécessiter un deuxième ajustement pour comparer des oranges avec des oranges.
Nous sommes donc fins prêt pour le tableau final.
Il peut certes y avoir d’autres facteurs que les taxes prudentes pour expliquer une meilleure efficacité fiscale. Une meilleure lutte à la contrebande, par exemple, peut contribuer aussi à ce bon résultat.
Aussi, ce calcul demeure imparfait étant donné que nous avons combiné les fumeurs quotidiens (qui forment la vaste majorité) avec les occasionnels, mais cela ne change rien à la tendance qui est claire et nette.
Il n’empêche que le niveau de taxation est drôlement important et aussi, que c’est le genre de mesure avec lequel il ne faut pas se tromper car une fois les taxes haussées, il n’y a pas de marche arrière.
D’avoir gardé les taxes basses s’est donc avérée une excellente stratégie de la part de Québec pour maximiser ses bénéfices et son pouvoir de taxation dans le tabac, au profit de l’ensemble de la collectivité.
Et les dépanneurs peuvent être fiers, à juste titre, de contribuer à financer l’État québécois en collectant et en remettant les taxes sur le tabac.